Aaah, le monde comptable et sa sévérité… Chaque nouveauté prend des allures de cataclysme, et les normes IFRS (pour international financial reporting standards) n’échappent pas à la règle. Depuis qu’elles sont devenues, en 2005, le cadre de référence de la comptabilité de toutes les entreprises européennes, ces dernières restent à la recherche de nouveaux moyens de les appliquer. Pour faire le point sur la petite dernière, entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2019 : la norme IFRS 16, nous avons demandé à Imed Mansouri, Product Owner spécialisé en Comptabilité chez Akuiteo, de nous l'expliquer.
Qu’est-ce que la réglementation IFRS 16 ?
Norme IFRS 16 : définition
L’objectif principal de la norme IFRS 16 ? Développer un cadre de référence international, afin de pouvoir comparer les bilans comptables des entreprises de tous les pays.
Cette nouvelle norme comptable est le fruit d’un constat : la tendance est à la location. Si les particuliers ont de plus en plus recours au leasing, c’est aussi le cas des entreprises, qui louent désormais davantage qu’elles achètent.
Cette évolution des pratiques a créé un déséquilibre entre, d’une part, les entreprises qui passent par la location et, d’autre part, celles qui privilégient encore l’achat. L’IFRS 16 remplace la norme IAS 17 pour établir un nouvel équilibre.
Quelles entreprises sont concernées par l’IFRS 16 ?
Les entreprises concernées par la norme IFRS 16 sont :
- les sociétés cotées et leurs filiales ;
- les sociétés ayant opté pour l’application du référentiel IFRS ;
- les sociétés établies dans un pays dont la norme IFRS est le référentiel local.
Application de la norme IFRS 16 : les exceptions
Les actifs dits de faible valeur – c’est-à-dire dont le montant est inférieur à 5 000 USD – échappent à l’IFRS 16. En revanche, même si le coût de la location est inférieur à ce montant, les véhicules restent concernés par l’application de la norme.
Enfin, les actifs dont la durée de location est inférieure à 12 mois sont exonérés de la norme IFRS 16.
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Les conséquences de la norme IFRS 16
La norme IFRS 16 a donc vu le jour pour répondre au déséquilibre susceptible d’exister entre deux sociétés réalisant le même chiffre d’affaires.
Imaginez deux entreprises du même secteur d’activité, mais aux habitudes différentes. L’une achète du matériel : un photocopieur, par exemple. L’autre loue ce même photocopieur.
Dans le premier cas, l’achat fait partie du bilan de l’entreprise et sera donc visible dans ses immobilisations. L’amortissement d’un tel achat peut nécessiter plusieurs années.
Dans le cas de la société qui loue, celle-ci dresse un bilan plus mince. Pourtant, elle peut disposer d’un grand nombre de biens !
Une meilleure vue financière...
Comparer ces deux sociétés il y a quelques années ? Impossible ! En effet, le bilan est forcément différent... Dans un cas, on est amenés à penser que la société a du passif. Dans l’autre, le bilan est réduit, donc on pense qu’il s’agit d’une petite entreprise.
Malgré cela, à activité égale, l’une et l’autre peuvent avoir le même chiffre d’affaires, et la même quantité de biens.
Avec l’IFRS 16, née dans un souci d’équité, tous les contrats de location doivent être mentionnés dans les bilans afin d’éviter tout déséquilibre.
… mais un cadre normatif source de certains abus
La nouvelle norme IFRS 16 a ainsi l’avantage d’offrir une meilleure visibilité financière… mais on n’a pas dit qu’elle n’avait aucun défaut : qui dit nouvelle règle, dit nouvelles transgressions !
Depuis la mise en place de la norme, beaucoup d’abus ont été constatés, du fait :
- de la complexité de la norme ;
- de son impact potentiel sur le poids financier d’une société et l’EBITDA, certaines entreprises en profitant pour faire baisser le montant de leur impôt.
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L’impact de l’IFRS 16 pour les entreprises et les analystes
Les conséquences pour les entreprises
Alors que beaucoup d’entreprises ont désormais recours au crédit bail ou à la location, l’impact de l’IFRS 16 au sein de ces sociétés est de plus en plus fort. Soumises aux normes IFRS, elles sont en effet dans l’obligation de retraiter leurs bilans et voient leur état financier impacté.
Certaines entreprises publient d’autres données, ce qui complexifie la vision des analystes et nécessite parfois l’ajout de certains documents.
Les conséquences pour les analystes
Pour les analystes et les investisseurs, l’instauration de l’IFRS 16 n’offre donc pas systématiquement une meilleure visibilité financière.
La norme les oblige à revoir tous leurs indicateurs, avec un impact sur de nombreux ratios, dont l’excédent brut d’exploitation et la rentabilité des capitaux investis (ROCE).
Pour l’heure, de nombreuses données sont encore à traiter pour établir les meilleures comparaisons. Leur principal défi reste de se familiariser avec l’IFRS 16 !
Alors, vous appliquez déjà l’IFRS 16 de la meilleure des manières ? Ne tombez pas dans le piège de la triche, et surveillez son impact sur l’EBITDA : gardez un œil juste sur la santé financière de votre entreprise pour éviter toute mauvaise surprise et la piloter d’une main de maître !
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